Renoncer à la viande, au fromage, au miel, etc. est en vogue, et pas seulement à Hollywood. Les livres, les magazines et les émissions de télévision parlent du végétalisme en permanence. Qu'apporte réellement l'alimentation végétalienne ? Le phénomène du « Peacefood » examiné à la loupe.
Pas de beurre ni de lait, pas d'œufs, pas de fromage, pas de viande, pas de poisson, pas de miel, pas de couverture en duvet ni de cuir ! Pour la majorité des résidents en Suisse et dans les pays voisins, cet appel à renoncer aux produits cités semble aussi étrange et incompréhensible qu'une conversation en swahili. « Les végans, une bande de fous ! » estiment certains.
Reste que même les carnivores purs et durs deviennent songeurs lorsque les végans brandissent l'élevage intensif parmi leurs principaux arguments : les animaux d'élevage vivent dans des halles semblables à des usines, destinés à une productivité maximale et abattus bien trop jeunes ; même les amateurs de viande, de fromage et de lait désapprouvent cela.
De même que l'effet désastreux sur le climat de l'agriculture et de l'élevage intensifs. Rien d'étonnant à ce que l'alimentation végétalienne soit désignée par ses défenseurs comme Peace-food (alimentation pour la paix).
Auteure : Petra Horat Gutmann, 3.15
Le hic, c'est que la plupart des gens en Occident considèrent la viande, le lait, le fromage, etc. comme des sources indispensables pour acquérir force et performance. Qu'en est-il en réalité ? Le professeur Claus Leitzmann étudie cette question depuis de nombreuses années. Le chercheur en nutrition et spécialiste de la nourriture saine explique : « L'alimentation végétalienne couvre les besoins à condition de consommer une grande diversité de végétaux et d'absorber de la vitamine B12. Sous l'angle de la santé, cette forme d'alimentation doit être adoptée uniquement par ceux qui disposent de solides connaissances nutritionnelles ».
Autrement dit : ceux qui souhaitent vivre selon le mode végan tout en restant en bonne santé et en forme ne doivent pas se comporter en « végan du dimanche », et compenser le renoncement aux produits issus des animaux par une consommation irraisonnée de pain, de pâtes et de sucreries. Selon les spécialistes comme Claus Leitzmann, l'alimentation basée sur une grande diversité de végétaux signifie consommer quotidiennement différents légumes, de la salade, des fruits, des céréales complètes, des légumineuses, des noix ou noisettes, et des graines.
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Une alimentation végétalienne saine fournit bien plus de fibres, de potassium, de magnésium, de vitamine C, de vitamine E, d'acide folique et de substances végétales secondaires que l'alimentation diversifiée issue des végétaux et des animaux. De même, le très faible taux de cholestérol du régime végétalien est remarquable. Même la réduction drastique de la consommation de protéines peut s'avérer bénéfique, car, du fait d'un excédent de protéines animales, les lames basales des capillaires s'épaississent ou « s'encrassent » comme en cas de cholestérol élevé.
Ainsi les végans se nourrissant sainement en tirent les mêmes profits que les ovo-lacto-végétariens : un effet préventif contre le surpoids, l'artériosclérose, l'hypertension artérielle, le diabète de type 2, la goutte et les maladies cardiovasculaires. D'un point de vue médical complémentaire, on observe avec intérêt que certains troubles de la santé disparaissent dès que les produits issus des animaux sont éliminés - il s'agit notamment très souvent des allergies, des maladies de la peau et des inflammations chroniques des sinus. Selon certaines études sur les facteurs pathogènes, il y aurait également un risque plus faible de contracter certains types de cancer, notamment affectant les organes digestifs.
Cela a l'air parfait. Si seulement il n'y avait pas un hic ! Comme le révèlent diverses études, l'alimentation végétalienne (ou végane) n'est souvent pas appliquée de manière si formidable au quotidien. Notamment les enfants végans manquent parfois de protéines, leur taux de calcium et de zinc a tendance à être trop bas. Il en va de même pour les femmes enceintes ou allaitantes et pour les personnes âgées.
Aussi les végans bien informés absorbent-ils des compléments. Une mesure pertinente, notamment concernant la vitamine B12. En effet, « la plupart des plantes contiennent des vitamères B12, qui ne sont pas assimilables par l'être humain ou seulement en très faible quantité, et qui empêchent même l'absorption de la vitamine B12 utile à l'humain » explique le chercheur en nutrition C. Leitzmann. Il en résulte que les fournisseurs classiques de vitamines B12 comme la levure de bière, l'orge, les germes de céréales, la choucroute, les produits dérivés du soja comme le miso, le tempeh ou le tamari, ainsi que la plupart des micro-algues, ne constituent pas une source suffisamment fiable de vitamines B12 pour l'être humain.
Selon le professeur Leitzmann, « les gens insuffisamment informés contribuent partiellement à la mauvaise réputation des végans, comme lorsqu'ils se rendent chez le médecin avec leurs enfants pour cause de carence. Heureusement de tels cas sont rares, et contribueraient à oublier que « chaque jour, des milliers de mangeurs de viande meurent de maladies induites par l'alimentation ».
Autrement dit : ceux qui souhaitent adopter une alimentation végétalienne doivent s'informer précisément et appliquer dans leur vie quotidienne les connaissances acquises. Il s'agit de connaissances sur les valeurs références pour l'apport nutritif quotidien, sur la teneur nutritive en éléments vitaux des aliments fréquemment consommés, ainsi que certaines interactions entre les aliments ou leurs substances. Ainsi par exemple, l'assimilation du fer augmente de près de 300 % lorsqu'il est associé à de la vitamine C.
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Il existe une multitude de produits végétaliens dans les boutiques diététiques, les magasins bio ou sur l'Internet. La qualité va des substituts de viande et de saucisses « synthétiques caoutchouteux » aux créations succulentes, comme le beurre bio à l'huile de coco ou de palme, ou le lait et la crème à base de céréales, de riz ou d'amandes. D'après C. Leitzmann, l'offre va continuer de s'étoffer, avec par exemple des produits au lupin européen, qui, avec ses 40 % de protéines, constitue une alternative intéressante aux graines de soja. Autre exemple : le chanvre, « dont les graines se situent entre le lait et la viande en termes de teneur en protéines et de biodisponibilité ».
On constate en outre avec plaisir que les cuisiniers professionnels végans ne recommandent généralement pas les plats préparés chers, mais ont recours à une grande variété de « matières premières » de qualité bio. Pour ceux qui mangent de tout et qui s'intéressent à la cuisine, il est enrichissant de découvrir comment la cuisine végétalienne utilise à foison les aromates, les épices, les céréales de nos régions ou de contrées lointaines, le tofu, les légumineuses connues et celles tombées dans l'oubli, les légumes, les fruits, les noix et noisettes, les purées d'oléagineux et les graines.
L'intérêt croissant envers l'alimentation végétalienne n'est pas étranger au fait que de nombreux cuisiniers végans montrent de l'attachement au terroir, de l'enthousiasme et aucune attitude moralisatrice.
Ainsi l'étudiant en physique Attila Hildmann, de Hambourg, auparavant avide de viande, a appris à cuisiner lui-même ; il a perdu 25 kilos grâce à l'alimentation végétarienne/végétalienne. Ses livres, ainsi que ceux d'autres adeptes du végétalisme, sont des bestsellers, leurs présentations filmées sur la cuisine sont suivies par des centaines milliers de personnes sur « YouTube » et à la télévision.
Cela attise la curiosité et fait naître l'espoir d'agir pour l'environnement et les animaux en se privant au minimum - selon la logique « mieux vaut être végan de temps en temps que jamais ! »