Difficile de croire que des aliments qui, lorsqu'ils ne sont pas mûrs ou à peine cuits, sont (légèrement) toxiques, figurent presque chaque jour à notre menu. Découvrez la partie I de notre série sur les plantes toxiques. En vous abonnant à la newsletter, vous serez aussitôt informé de la publication en ligne du prochain article.
Les plantes toxiques - la série en quatre parties d'A.Vogel :
Auteure : Ingrid Zehnder, 06.14
Aujourd'hui encore, on ne sait pas très bien si ce fruit, considéré comme une baie d'un point de vue botanique, a été cultivé tout d'abord au Pérou ou au Mexique. La tomate est arrivée très tôt en Europe, plus exactement en Espagne, après la conquête du Mexique et de l'Amérique du Sud. Les premiers témoignages écrits datent de 1544. Longtemps considérée comme une plante d'ornement exotique, elle fut appelée pomme d'or, pomme d'amour ou pomme du Pérou. Il a fallu attendre trois siècles pour que la tomate se diffuse dans les différents pays d'Europe et devienne un aliment apprécié, puis de plus en plus de variétés furent cultivées.
Il existe de minuscules tomates, de la taille d'une cerise, des fines, des charnues, des plates, en forme de poire ou de banane, certaines ont des sillons, des rides, des dentelures, il y en a des rayées, des tachetées, des marbrées, la palette des couleurs va du blanc et de l'orange jusqu'au brun et au violet noir, en passant par le rose. On dénombre 4 000 variétés de tomates dans le monde, portant des noms comme « African Beefsteak Orange » ou « Zeas Sonnabend White ».
Nombre de solanacées, comme la tomate, contiennent une substance toxique, la solanine, qui peut être quelquefois aussi désignée par tomatine. L'absorption de 400 milligrammes de ce toxique dans la plante serait mortelle pour un adulte. Rien que 25 milligrammes - c'est ce que contient une tomate verte non mûre (d'un poids de 80 g) - peuvent provoquer nausée et maux de tête. Dès que la tomate est à demi mûre, de couleur orangée, la teneur de la plante en toxique chute à deux milligrammes, un taux inoffensif. Les tomates rouges arrivées à maturité n'en contiennent plus que des traces, elles regorgent en revanche d'excellentes substances vitales.
Il existe en outre de nombreuses variétés de tomates qui restent vertes ou presque en arrivant à maturité. Des variétés comme « Green-Zebra » ou « Evergreen », entre autres, ne contiennent pratiquement pas de solanine lorsqu'elles sont mûres, malgré leur peau de couleur verte.
Lorsqu'il commence à faire frais dehors, il reste des tomates pas encore mûres sur les plantes de nos balcons ou de nos jardins. L'idéal est de les envelopper avec leur trognon ou leur pédoncule dans du papier journal, et de les laisser mûrir dans une pièce relativement chaude, même sans lumière ; la teneur en solanine va alors chuter, et la plante perdra sa toxicité.
Certains préparent de la confiture à partir de tomates vertes, ou les conservent dans une marinade à l'aigre-doux. Si la teneur en solanine de la confiture représente 55 à 65 % de la quantité initiale, elle approche encore 90 % de toxicité dans les tomates à l'aigre-doux. Les spécialistes estiment que la confiture est sans danger dans des quantités normales, la variante marinée à l'aigre-doux devrait en revanche être évitée, car la plante peut encore contenir des toxiques.
La solanine, un glycoalcaloïde toxique de la plante, est résistante à la chaleur, à un goût amer, et est présente sur les parties vertes et sur les germes qui se forment lors de stockage trop chaud ou par trop de clarté. Comme la solanine n'est pas détruite par la cuisson, il faut ôter largement avec un couteau les parties vertes de la peau et celles autour des germes pour faire diminuer la toxicité de la pomme de terre.
100 grammes de pommes de terre mûres contiennent normalement entre 5 et 7 milligrammes de solanine. La valeur limite fixée internationalement dans le commerce se situe à 20 mg / 100 g. Au-delà, la plante devient toxique pour l'homme.
Près de 80 % des toxiques de la plante sont éliminés par l'épluchage. En outre, une autre partie se perd dans l'eau de cuisson.
Reste que si on les fait cuire avec leur peau, pour garder les vitamines et les sels minéraux, et qu'on les épluche avant de les manger, il est alors inutile de craindre des effets indésirables du toxique contenu dans cet aliment.
Sur les marchés et dans les magasins, on trouve souvent des variétés avec des tubercules bleus ou rouges, comme la « Blaue St. Galler », « Rote Emma », « Red Cardinal » ou la « Vitelotte ». Cette couleur est due aux anthocyanes, ce sont des substances végétales secondaires à l'action antioxydante. Pour éviter de perdre les anthocyanes bénéfiques, les pommes de terre colorées doivent être cuites de préférence avec leur peau. Pour réduire le taux de solanine et éviter l'empoisonnement lors de la consommation, les éplucher est cependant recommandé.
L'aubergine violet foncé, en forme de massue, contient elle aussi de la solanine en faible quantité, cette molécule qui rend la plante toxique, sur les parties vertes et sur le pédoncule. Sur son lieu d'origine en Asie, on trouve des variétés blanches, jaunes, vertes et rayées, de forme ronde, ovale ou allongée, au goût parfois sucré, et certaines que l'on peut même consommer crues.
Les poivrons contiennent la même substance toxique dans leur plante uniquement lorsqu'ils ne sont pas encore mûrs et sur le pédoncule (non comestible) du fruit mûr. Grâce aux sélections des cultures, non seulement l'acidité, mais aussi les substances aigres et la solanine toxique ont pratiquement disparu. Les poivrons jaunes, orangés ou rouges, et même dans les poivrons verts non arrivés à maturité ne sont pas en revanche des légumes toxiques. Pour les poivrons, il faut surtout craindre les résidus de pesticides bien plus que la solanine, toxique naturel de la plante, comme l'a montré Greenpeace.
Les plantes de la famille des solanacées et leur substance toxique, la solanine, ne sont pas les seuls « malfaiteurs ». D'autres plantes alimentaires peuvent, dans certaines circonstances, s'avérer dangereux ou toxiques pour l'homme.
Les haricots crus (verts et jaunes) sont toxiques. La cosse et les grains contiennent de la phaséoline, un toxique naturel de la plante. Il s'agit des lectines, du groupe des glycoprotéines, capables de se lier aux glucides. Cela provoque des agglomérations des globules rouges et un encombrement des vaisseaux sanguins. De plus, ces protéines peuvent s'accrocher aux villosités intestinales et perturber considérablement leur fonction. Les symptômes de l'intoxication commencent en général une à trois heures après l'absorption, et se manifestent par des vomissements. À plus forte dose, le poison contenu dans le légume entraîne crampes d'estomac, vomissements violents, diarrhées sanglantes, frissons et crampes.
La plus grande précaution est recommandée notamment chez les enfants. Les centres antipoison doivent en effet encore et toujours traiter des empoisonnements dus aux grains ou aux cosses de haricots crus.
Lors de la cuisson, les protéines toxiques de la plante sont détruites par la chaleur. Aussi est-il nécessaire de faire cuire les haricots au moins quinze minutes, à une température de 75 degrés minimum. Comme le poison naturel ne se diffuse pas dans l'eau, l'eau de cuisson ou le bouillon de légumes peuvent être réutilisés. On peut également tout à fait faire cuire les haricots en potée.
La cuisson est indispensable pour toutes les variétés de haricots, ainsi que pour les graines de soja et les haricots d'Espagne (ou Haricot fleur) riches en lectines, parfois utilisés comme plante d'ornement pour leurs jolies fleurs qui contiennent également de fortes doses de toxiques.
Les haricots surgelés doivent également être cuits, car ils sont généralement uniquement blanchis avant la surgélation, ce qui réduit certes la phaséoline mais ne détruit pas le poison naturel de la plante.
À noter : les pousses du haricot mungo (Vigna radiata), souvent appelées à tort pousses de soja, ne contiennent pas de phaséoline.
Très fréquents dans la cuisine orientale, méditerranéenne et végétarienne, les pois chiches crus contiennent eux aussi de la phaséoline, toxique naturel de la plante. Les pois chiches frais ou secs doivent tremper au moins douze heures dans l'eau (il faut changer l'eau plusieurs fois), puis cuire pendant deux heures dans de l'eau fraîche.
Les pois chiches en conserve (en boîte ou en bocal) sont précuits et peuvent être utilisés immédiatement sans risque d'empoisonnement.
Les germes de pois chiches contiennent également une faible quantité de toxique, il est recommandé de les blanchir avant de les consommer (30 secondes dans de l'eau frémissante avant de les passer aussitôt à l'eau froide).
Les compotes et les gâteaux à la rhubarbe sont délicieux. Cependant, la forte teneur en acide oxalique, toxique naturel contenu dans les feuilles et les tiges crues rouges vertes de la plante peut provoquer des intoxications. Mais ce toxique de la plante a un effet bien plus préoccupant : il se lie au calcium. Cela peut provoquer la formation de cristaux qui se déposent dans les reins ou dans l'urine (calculs rénaux ou urinaires). En outre, cet acide s'attaque à l'émail dentaire.
La récolte des jeunes tiges rouges, l'épluchage et la cuisson permettent de réduire la toxicité de l'acide oxalique. Le blanchiment ou la cuisson éliminent une bonne partie du poison de la plante, eau qu'il faut ensuite jeter. Autre astuce contre l'effet nocif de l'acide oxalique : consommer la rhubarbe avec du lait, de la crème, du yaourt, du flan ou de la sauce vanillée. Ainsi, l'acide se fixe au calcium présent dans ces ingrédients et non au calcium du corps, éliminant ainsi tous les risques d'intoxication.