Une bande d’herbes et de fleurs indigènes le long d’un champ peut réduire l’invasion de parasites et rendre superflue l’utilisation de pesticides.
Aussi joli soit le criocère des céréales (Oulema melanopus) avec son petit corps de quatre millimètres, son pronotum rouge, ses élytres d’un bleu-noir brillant et ses pattes oranges, il peut causer énormément de dégâts dans les champs de céréales.
Les coléoptères et les larves qui ressemblent à des minuscules limaces abîment les feuilles de blé, d’orge et d’avoine, car ils y rognent des longues bandes très rapprochées les unes des autres. Une étude menée par Matthias Tschumi à la station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART à Zurich a montré qu’il était possible de réduire la présence de ces parasites de manière naturelle.
Dans les cantons d’Argovie et de Zurich, 15 champs de blé d’hiver ont été entourés de bandes de plantes sauvages larges de trois mètres. Quinze champs de contrôle n’ont pas été entourés de ces bandes fleuries. Tous les champs utilisés lors de cette expérience ont été traité sans pesticides.
Le mélange de graines avait une composition différente de ceux connus jusqu’à présent et qui avaient pour but de favoriser la biodiversité. Le but des chercheurs était d’utiliser des plantes susceptibles d’offrir un habitat aussi adapté que possible aux ennemis des destructeurs de céréales.
Le mélange de graines annuel récemment développé se compose des fleurs sauvages suivantes : anthémis des champs, cerfeuil commun, bleuet, pavot ainsi que des herbes suivantes : sarrasin, aneth et coriandre. Cette diversité de pollen et de nectar assure l’épanouissement d’insectes utiles tels que les coccinelles, les carabidés, les syrphides et les chrysopes.
Grâce à l’exemple des criocères des céréales, les chercheurs ont pu montrer que les bandes de plantes annuelles non fertilisées et non traitées n’attirent pas seulement des insectes utiles mais qu’elles diminuent également de manière significative la présence des parasites dans les champs de blé d’hiver.
En comparaison aux champs de contrôle, on a constaté une diminution de 47 pour cent du nombre de larves et le nombre de criocères des céréales adultes a même chuté de 53 pour cent. Les dégâts causés par les ravages sur les feuilles ont diminué de 62 pour cent. Ainsi, comme les scientifiques l’ont constaté, les bandes fleuries le long des champs (le mélange de graines est disponible dans le commerce cette année) constituent une alternative viable aux pesticides.
Dans le cadre du projet « 100 Nützlingsblühstreifen », les chercheurs de la station de recherche Agroscope vont étendre cette année les expérimentations sur les exploitations et les écoles agricoles dans toute la Suisse afin de déterminer si, en plus d’épargner l’utilisation de pesticides, les bandes fleuries ne contribueraient pas aussi à améliorer le rendement.
D’autres expérimentations de la station de recherche Agroscope suggèrent que les bandes de fleurs sauvages réduisent également le nombre de pucerons sur les plants de pommes de terre. L’Institut suisse de recherche de l’agriculture biologique (FiBL) a développé un mélange de semences pour les bandes fleuries le long des champs de chou avec du sarrasin, des vesces, des bleuets et des pavots. Les insectes utiles qui s’épanouissent dans ce milieu peuvent réduire considérablement le nombre d’œufs de noctuelle du chou sur une distance allant jusqu'à 30 mètres, ce qui permet une diminution considérable de l’utilisation de pesticides coûteux.
Partout, on cherche à optimiser des mélanges de graines utilisables précis et, tout comme le consommateur, les chercheurs de l’Agroscope espèrent que le « lien direct entre les bandes fleuries, la diminution des parasites et la diminution des dégâts sur les plantes cultivées incite(rait) les agriculteurs à utiliser eux-aussi ces mélanges recommandés ».